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Faut-il être bourré (hungover) pour traduire les titres de films US ?

Ecrire pour le cinéma ou écrire sur du cinéma? Aujourd’hui, je vais vous parler d’une activité qui me passionne : créer des titres et sous-titres de films

Si je décide de lever le voile sur cette tendance absurde de traduire les titres en anglais par d’autres titres en anglais ou encore de ne tenir absolument aucun compte du sens lorsqu’il s’agit d’adapter le titre d’un film US … c’est parce que j’ai vécu cela de l’intérieur.

A l’époque j’aurais pu produire moult rapport d’étonnements sauf qu’à l’époque, un peu avant 2000, cette méthode consistant à faire état de sa surprise face à des pratiques professionnelles étonnantes n’existait pas. Et c’est fort dommage. Comme je le disais, j’aurais pu en produire au kilomètre de l’étonnement. Allez, j’aurais pu aller jusqu’à l’effarement. Abasourdi, de quoi l’être il y avait.

adapter un titre de film Cyril Belange

Jugez plutôt : je venais d’avoir dix-huit vingt-cinq ans et je débarquais à Paris, bon OK, à Joinville-le-Pont, à deux pas des guinguettes de la Marne où il fait bon vivre lorsque l’on peut pointer le nez hors du laboratoire de sous-titrage. C’était là que je faisais mes premières armes après deux ans d’études intensives de l’art de la traduction. Traduction juridique, économique, des institutions européennes, traduction journalistique, traduction simultanée et donc traduction audiovisuelle spécialité sous-titrage. 

Entre parenthèses : j’avais atterri dans la très prisée section sous-titrage suite au désistement opportun d’une camarade grecque rentrée au pays poursuivre ses humanités. Aucun rapport avec la crise économique qui sévirait quelques années plus tard.

J’étais donc remonté comme un coucou suisse et prêt à en découdre pour faire la preuve de mon talent d’adaptateur, car il ne s’agit pas de traduire; sous-titrer c’est adapter. Je précise, à toutes fins utiles, car vous le verrez cela peut avoir son importance. Pour les traducteurs, parce que pour les distributeurs AKA le client, pas trop en fait. Pas du tout. Pas bezef comme dirait mon père. C’est de l’arabe ça veut dire pas grand-chose.

J’avais suivi un premier stage dit d’observation auprès des techniciennes vidéo du laboratoire pour apprendre à piloter le logiciel de sous-titrage dédié de la société et maîtriser par la suite le spotting consistant à repérer débuts et fins des prises de paroles des personnages pour en faire de jolies cases destinées à accueillir les sous-titres que toi, cher spectateur, lis pour suivre l’intrigue.

écriture de sous-titres

J’étais heureux d’ouvrir le capot pour comprendre comment on fabrique les sous-titres.

La délicatesse des techniciennes pour identifier le souffle léger avant les premiers mots prononcés de chaque dialogue pour fixer le TIME CODE IN ou TIME CODE OUT indiquant le moment, à l’image près, pour faire apparaître le sous-titre. Ni avant ni après. Pile poil au moment où le son parvient à tes oreilles dans la salle de cinéma. J’avançais, j’apprenais petit à petit à découper moi aussi les films que je ne regardais pas vraiment… les fantasmes des copains qui me tapaient dans le dos en disant mon salaud tu te mates tous les films en avant-première. Comment dire : oui mais non.

Cela restait un job parfaitement excitant mais d’une rigueur extrême. J’avais parfois du mal à rester concentré une journée entière sur un même film, on me donnait des films sans tenir compte de la langue parlée, j’ai donc bossé sur de l’italien, du russe, une respiration est une respiration qu’elle soit moscovite ou romaine.

Le souffle est universel.

Dans l’obscurité, j’attendais mon heure. Ce moment où l’on viendrait me chercher pour adapter un film de mafieux, un policier bien rugueux farci d’expressions de la rue réputées intraduisibles. Impatient, je frôlais la fébrilité.

J’eus droit à un premier galop d’essai, un film de SF en noir et blanc qui me parut fort étrange, je compris mieux quand je sus que c’était un remastering de classique pour une cinémathèque obscure.

frankenstein

J’étais accro. J’aurais bien aimé m’attaquer à un long métrage, en anglais de préférence, même si me débrouillais en espagnol. Question de goût pour les productions hollywoodiennes. Et je n’avais pas encore vu Abre los ojos à l’époque. J’ignorais l’existence d’Almodovar. Toute une culture ciné à acquérir.

Ma chance arriva de manière détournée. L’une des techniciennes, traductrice de formation, me proposa de participer à une simulation…

je sens que vous avez envie de connaître la suite ! Je vous donne rendez-vous ici même très bientôt !

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